Un nuage londonien [libre]

Le train attendait sagement que les voyageurs montent à l'intérieur. Sur le quai, la foule se pressait, se bousculait, cherchant à y entrer le plus vite possible. Le bruit des discussions, les cris, les embrassades et autres adieux résonnaient sourdement aux oreilles de Valina. Enfermée dans sa bulle, le monde l'entourant lui semblait flou, parfois accéléré, parfois ralenti, lui faisant tourner la tête comme dans les carrousel de sa jeunesse, avec leurs chevaux de bois et leurs couleurs passées.

Face à la jeune fille se tenait un grand garçon, aux cheveux aussi roux que les siens et aux même yeux verts plein d'eau. Ils se tenaient les mains, la fille s'agrippant de toutes ses forces à son partenaire. Aux yeux des inconnus du quai, peut-être passaient-ils pour un couple refusant la séparation toute proche. Si proche que Valina pouvait la toucher et l'entendre, par son épaule s'appuyant contre la poignée du wagon et dans le signal sonore indiquant le dernier instant pour grimper dans le train. Soudain, il fut juste temps pour Valina de quitter son vis-à-vis, laissant ses doigts abandonner le plus doucement possible ceux de son frère. Les portes du train se refermèrent sur le beau visage du garçon, les yeux des deux jeunes gens restant ancré les uns dans les autres. Les lèvres de la jeune fille murmurèrent un délicat "je t'aime", comme le train commençait à avancer doucement. Le train pris de plus en plus de vitesse, éloignant de plus en plus son frère de Valina. La rousse resta là, les bras ballant, sa légère robe d'été bruissant doucement, battant délicatement contre ses jambes. Tournant les talons, elle entra dans la gare, quittant le quai où son frère lui avait été enlevé.

Valina fit quelques pas à l'intérieur du bâtiment, avant de glisser le long d'un mur un peu sale. Elle laissa couler librement les larmes jusqu'alors contenues. C'était trop compliqué, laisser partir son frère jumeau comme ça. Elle ne pouvais plus le supporter, ne jamais savoir quand elle le reverrai, pour combien de temps il revenait... C'était à se taper la tête contre les murs et justement, elle en avait un derrière elle. Laissant sa tête partir en arrière et cogner doucement contre la paroi, elle sourit légèrement à travers ses larmes.